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« C’est au centre de la moelle que se forment les globules rouges du sang, lieu de l’oxydo-réduction, cœur de la respiration où se rejoignent respiration extérieure et respiration intérieure. Tout comme l’arbre des forêts exprime l’oxygène nécessaire à notre respiration, l’os est notre arbre en formation et sa moelle en est la sève. »*
La fille est par terre, danse au sol, gestes lents ; tenue : bleu de travail. Au plateau un musicien entouré de ses instruments.
À chaque inspire et expire, elle cède son poids à la terre, tout s’allège et le mouvement peut se déployer lentement. La danse, induite par la respiration, joue de transferts d’appuis.
Elle relie la pensée au souffle qui devient par cette action de plus en plus fin et long.
Elle développe son attention et tous ses sens pour les faire circuler sur une myriade de points, de lignes, formant des fleuves dans lesquels ses émotions, ses sentiments et tout ce qu’elle perçoit du monde se déversent. Les tissus corporels vibrent, la peau se hérisse, dans les oreilles, la fibrillation de l’air monte en intensité. Elle frémit jusque dans la moelle osseuse, et guidée par ces vibrations, se déplace intérieurement.
Elle se demande : comment rendre palpable cette légèreté, ces frémissements, cette dilatation du temps et de l’espace autrement qu’en la vivant ? Comment rendre compte via la composition chorégraphique du paradoxe entre la descente du poids et la montée du flux, jaillissement qui surgit dans le cœur vibrant de nos os, « notre arbre et le noyau de notre sang? »*
La composition chorégraphie joue de l’alternance des passages dans lesquels le flux circule dans la globalité du corps, et de moments de suspensions où une partie agit de façon presque invisible, pour laisser apparaître, quasi-immobile, la forme suivante. Ces moments, presque arrêtés, sont de différentes natures. Certains sont l’amorce d’une nouvelle orientation qui se concrétise à la fin de l’action, imperceptible, d’un segment de corps ; d’autres viennent contrecarrer le cours naturel du mouvement, ou au contraire se situent à son apogée. Ces pauses jalonnent la remontée du corps qui s’extirpe du sol, et retardent la posture debout.
Elle est enveloppée du flot à la fois puissant et immobile mais également foisonnant de vibrations, de détails et des multiples agitations de la musique, flot sonore qui la soutient autant que contrecarre, vagues d’électricité organique.
Mai 2018 – Myriam Gourfink & Kasper T.Toeplitz
* D’après Annick de Souzenelle : La lettre chemin de vie – Chapitre XXIX
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“The red blood cells are formed in the centre of the marrow, the place of redox, the heart of the breath where external respiration and internal respiration meetJust as the tree in the forest emits the oxygen we need to breathe, so the bone is our growing tree and its marrow our sap”.*
The girl is on the ground, dancing on the floor, with slow gestures. Her outfit is a pair of overalls. On the stage is a musician surrounded by his instruments.
At each inhalation and exhalation, she yields her weight to the ground, everything becomes lighter, and her movement can unfold itself slowly. Her dance, carried by her breathing, draws on these transfers of weight.
She links her thinking to her breathing, the latter becoming longer and finer.
She expands her attention and all her senses to have them circulate over a myriad of dots and lines forming rivers into which can flow her emotions and feelings and everything she perceives of the world. Her body tissues vibrate, her skin bristles. In her ears, the fibrillation of the air is ever more intense. She shudders to the bone marrow and, guided by these vibrations, moves internally.
She wonders: how can I make palpable this lightness, these quivers, this dilation of time and space other than by living them? How can I explain via the choreographic composition of the paradox between the falling weight and the rising flow, this urge that wants out in the vibrating heart of our bones, here in “our tree and the core of our blood”?*
The choreographic composition plays with the alternation of those passages where the flow circulates inside the globality of the body, and with those moments of suspension where a part acts in an almost imperceptible matter to bring forth, almost immobile, the next form. These moments, almost freeze frames, are of different natures. Some usher in a new orientation that takes form at the end of the imperceptible action of a segment of the body, whilst others counteract the natural course of the movement or, on the contrary, are to be found precisely where the movement peaks. These breaks punctuate the rise of the body extricating itself from the ground, and delay the movement to the Standing posture.
The choreographic composition is wrapped inside the flow simultaneously powerful and motionless, but also teeming with vibrations, details and multiple agitations of music, a sound wave sustaining and thwarting, with waves of organic electricity.
May 2018 – Myriam Gourfink & Kasper T.Toeplitz
* Inspired by chapter 29 of La lettre, chemin de vie, written by Annick de Souzenelle
CHOREGRAPHY
Myriam Gourfink
COMPOSTION
Kasper T.Toeplitz
RÉALISATION
LOLDANSE et l’ADC (Genêve)
Coproduction Centre Pompidou. Le projet a obtenu une résidence de recherche (2017 – 2018) et une mise à disposition de studio (2018 – 2019) au CND à Pantin, et bénéficie d’un Accueil studio au Centre Chorégraphique National de Tours.
En négociation : un partenariat avec le Centre Henri Pousseur à Liège.
Création 12, 13 et 14 avril 2019 au centre Pompidou